Catégories
Stratégie éditoriale

Les règles légales applicables à la création de contenu

Rédiger des textes, concevoir des vidéos ou des visuels pour votre société n’est pas anodin. Si vous ne faites pas attention, vous courrez le risque d’enfreindre plusieurs législations nationales et internationales. Vos risques sont essentiellement financiers avec le paiement d’amendes salées (pas les amandes de l’apéro) et celui de dommages et intérêts à la personne lésée par votre contenu. Quelles sont les lois applicables ? De quoi se méfier ?  Découvrez tout dans cet article consacré aux règles légales applicables à la création de contenu.

Les droits d’auteur

  • Vous traduisez des articles publiés sur des sites étrangers pour alimenter votre blog et gagner du temps ? Sans en préciser la source ?
  • Vous avez utilisé une image ou un texte « trouvé » sur internet sans mentionner l’auteur ?

Avec de telles pratiques, vous risquez d’enfreindre le droit d’auteur. Bien entendu, il y a des nuances : 

  • L’auteur peut vous avoir autorisé à reproduire son œuvre (visuelle, littéraire, audio, etc.), par exemple. 
  • Elle peut être tombée dans le domaine public. 
  • Elle peut aussi être assortie d’une licence Creative Commons.
  • Etc.

Mais même dans ces hypothèses, une mention de l’auteur est nécessaire. 

Le droit de paternité

Un auteur ne peut pas renoncer ou céder ses droits moraux, dont fait partie le droit de paternité. En plus, les droits moraux ne prennent jamais fin, même après le décès de l’auteur.

Il est donc préférable de prendre l’habitude d’indiquer l’auteur de tous les contenus que vous publiez et qui ont été créés par d’autres. Même s’ils sont traduits. Même s’il s’agit d’un court extrait. Même si vous avez reçu l’autorisation formelle d’exploiter l’œuvre. Un lien hypertexte vers la source originale peut également convenir.

Les idées

Qu’en est-il des idées que vous découvrez ailleurs et que vous reprenez dans vos contenus (sans recopier le texte ou le visuel contenant ladite idée) ? 

Les idées n’étant pas protégées par le droit d’auteur, vous pourriez exploiter une idée ou un concept dans un contenu original (un article que vous créez, par exemple) sans en créditer l’auteur. Vous pourriez, mais est-ce une bonne idée ? Si vous reprenez un concept développé par une autre personne ou entreprise, il est préférable d’en mentionner la source pour garantir une parfaite transparence à votre audience. De plus, si l’idée est suffisamment originale et distinctive, son auteur pourrait éventuellement trouver une autre base légale pour vous attaquer, par exemple en invoquant une forme de parasitisme.

La diffamation et le dénigrement

  • Vos concurrents utilisent des pratiques que vous jugez trompeuses et vous voulez les dénoncer publiquement ?
  • Leurs produits sont de piètre qualité et vous voulez le faire savoir ?

Pouvez-vous céder à la tentation ? C’est risqué.

La diffamation

Si vous critiquez l’entreprise ou son propriétaire, vous risquez un procès pour diffamation. Selon l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, il y a diffamation lorsque la personne (physique ou morale) peut être clairement identifiée, que l’allégation nuit à son honneur ou à sa réputation, qu’elle est faite publiquement et qu’elle porte sur un fait précis.

Par exemple, dire sur vos réseaux sociaux que vous n’aimez pas la société X ne relève pas de la diffamation, car votre opinion ne relaie aucun fait précis. En revanche, affirmer que cette société ou ses dirigeants sont corrompus peut relever de la diffamation. Vous pourriez donc être poursuivi en justice et devoir prouver la véracité de vos allégations pour éviter une sanction. 

Vous avez donc intérêt à avoir des preuves solides avant de dénoncer les agissements de l’un de vos concurrents.

L’injure

Qu’en est-il si vous ne faites pas référence à des faits précis ? Pouvez-vous critiquer allègrement vos concurrents sans prendre de risques ? Non. La victime de vos propos pourrait porter plainte pour injure ou insulte. En plus, cela ne donne pas une très bonne image de votre entreprise.

Le dénigrement

Qu’en est-il des produits et services de vos concurrents ? Pouvez-vous les critiquer ?

La bonne nouvelle, c’est qu’il n’y a pas de risque de sanction pénale.

La mauvaise nouvelle, c’est que vous pourriez devoir payer des dommages et intérêts si la victime parvient à prouver que cela lui porte préjudice. En effet, il s’agit de dénigrement et vous engagez votre responsabilité civile. Vous pouvez échapper au paiement de dommages et intérêts si vous pouvez démontrer la véracité de vos reproches. Et ce type de preuve n’est pas facile à apporter. Mieux vaut donc critiquer avec prudence.

Le parasitisme

Pour essayer d’améliorer votre image de marque et votre autorité, vous avez décidé de copier l’identité visuelle d’un entrepreneur américain au succès international ? Vous avez repris ses couleurs, le design de son site, un logo similaire ? Il vous arrive même de traduire ses articles en français.

Cela ne nuit à personne, n’est-ce pas ? 

En fait, si. La personne dont vous profitez pourrait décider de vous poursuivre pour parasitisme, une pratique qui relève de la concurrence déloyale.

Le parasitisme consiste à tirer profit des efforts d’une entreprise pour s’en approprier la notoriété. Il n’est même pas nécessaire d’être dans le même secteur d’activité.

La publicité trompeuse ou mensongère

Difficile de se faire un nom sur un marché saturé. Vous peinez à vous faire connaître. Vos contenus manquent de la viralité suffisante. Vos produits ne sont pas assez sexys. Alors, vous pimentez votre communication : 

  • un « meilleur » par-ci ;
  • un « cadeau exceptionnel » par-là ;
  • un « numéro 1 » ;
  • etc. 

Ou vous jouer sur la peur de manquer des consommateurs en leur proposant une réduction exceptionnelle… 365 jours par an.

Ces pratiques peuvent être considérées comme déloyales.

En droit français, les consommateurs sont considérés comme des parties faibles qui nécessitent une protection spécifique. Cela est justifié par le déséquilibre d’information : le marchand connaît tous les aspects de son produit et de son offre, alors que le consommateur ne connaît que ce que le marchand lui dit. Il doit donc pouvoir faire confiance aux communications commerciales. C’est pour cela que la publicité et plus largement, les pratiques commerciales, sont strictement réglementées.

Autrement dit, vous ne pouvez pas tout dire. Vous ne pouvez pas utiliser un  « meilleur » ou un  « exceptionnel » parce que ça sonne bien. Vos communications doivent refléter la réalité : 

  • Vous ne pouvez pas mentir effrontément, par exemple en disant qu’un produit est en or alors qu’il est plaqué or. 
  • Vous devez aussi éviter les déclarations évasives qui peuvent induire le consommateur en erreur. 
  • Et vous devez être transparent : les omissions peuvent aussi être sanctionnées. C’est le cas, par exemple, si vous ne mentionnez pas la présence de bisphénol A dans un biberon.

Partez du principe que tout ce que vous dites doit pouvoir être prouvé. Si vous dites que votre produit est le meilleur, vous devez avoir des preuves de cette allégation.

Les réductions de prix

Vous avez lu que la peur de manquer (FoMO) était très puissante et qu’elle était activée grâce à l’urgence ? Depuis, vous proposez une réduction exceptionnelle sur le coût de vos produits et cela 365 jours par an (mais les consommateurs ne le savent pas) ?

En plus du manque d’éthique, c’est illégal. Il s’agit d’une pratique commerciale trompeuse. Et c’est précisément ce que le code de la consommation précise : le prix d’origine (non réduit) du produit est le prix le plus bas pratiqué par l’entreprise au cours des 30 jours qui précèdent la réduction.

La vie privée

  • Grâce aux cookies, vous pouvez traquer le comportement des internautes qui visitent votre site ? 
  • Vous demandez des tas d’informations dans vos formulaires de contact pour être certain de tout connaître sur vos abonnés et vos prospects ?
  • Vous amassez progressivement des tas d’informations sur vos clients ?

Tout cela concerne les données personnelles et la vie privée des internautes. Plusieurs lois tentent de mettre de l’ordre dans cette pagaille informationnelle.

En France, la loi Informatique et Libertés régit de nombreux aspects de la vie privée en ligne. Elle transpose la directive ePrivacy pour ce qui concerne l’usage des cookies et autres traceurs. Elle est aussi accompagnée du RGPD pour ce qui concerne le traitement des informations personnelles.

Les cookies et traceurs

Le principe de base est celui de la transparence et de l’information : les internautes doivent avoir le moyen de connaître les cookies et traceurs présents sur un site, le type d’informations qu’ils collectent, les systèmes utilisés pour cette collecte, etc. Cette information peut se faire grâce à un lien hypertexte vers une page dédiée.

Le deuxième principe est celui du consentement (ou de son absence). Avant de poursuivre sa navigation, l’internaute doit avoir le choix de ne pas être suivi ou d’être suivi par tout ou une partie de ces traceurs. 

Tant qu’il n’a pas donné son consentement, il ne peut pas être suivi. Il y a toutefois des exceptions : certains cookies peuvent être utilisés sans le consentement de l’internaute. C’est notamment le cas de ceux qui permettent de retrouver des articles dans le panier d’achats même après que le visiteur a quitté le site. Certains outils de mesure d’audience sont aussi exemptés de l’obligation d’obtenir le consentement des internautes.

Les données personnelles et le RGPD

  • Vous collectez le prénom et l’adresse email des abonnés à votre newsletter ?
  • Vous conservez les données de vos clients ?
  • Vous avez arpenté les rues pour récolter des signatures en vue de soutenir une pétition citoyenne ?
  • Vous avez acheté une liste d’emails pour envoyer vos promotions ? 

Toutes ces actions correspondent à un traitement de données personnelles. Celles-ci sont protégées par le RGPD (règlement général sur la protection des données) pour toutes les personnes présentes sur le territoire de l’UE, indépendamment de leur nationalité.

Vous devez donc agir avec prudence. D’abord, vous devez avoir une base légale pour traiter ces informations. Le plus souvent, il s’agit du consentement donné par la personne à laquelle ces données appartiennent.

Un consentement général ne suffit pas. Il doit être donné pour une ou des finalités spécifiques. Par exemple, vous avez installé un formulaire d’inscription à la newsletter de votre entreprise sur votre site et : 

  • Les adresses emails sont exclusivement utilisées pour envoyer les actualités de votre entreprise : dans ce cas, lorsque l’internaute clique sur le bouton pour s’inscrire à la liste de diffusion de la newsletter, il donne son consentement au traitement de ses données pour cette finalité.
  • Les adresses sont utilisées pour envoyer vos actualités ainsi que des communications commerciales telles que des promotions : il y a alors deux finalités différentes. L’internaute doit donner un consentement distinct pour chacune, par exemple grâce à deux cases à cocher (l’une pour consentir à recevoir la newsletter, l’autre pour consentir à la réception d’offres commerciales). 

Le consentement doit être éclairé, ce qui signifie que le consommateur doit être informé (ou avoir la possibilité de s’informer). Vous pouvez notamment insérer un lien hypertexte sous le formulaire qui renvoie vers une page qui précise l’identité du responsable du traitement des données, la ou les finalités, les droits de l’internaute, etc.

De plus, vous ne devez collecter que les informations nécessaires. Si vous insérez un formulaire de contact sur votre site, vous n’avez réellement besoin que de deux informations : l’adresse email de la personne qui vous contacte et son message. Ces deux champs (adresse email et message) sont donc obligatoires. Si vous avez envie de connaître le nom de votre interlocuteur ou son numéro de téléphone, vous pouvez ajouter des champs, mais ceux-ci doivent être facultatifs : ils peuvent être laissés vides par l’auteur du message s’il ne souhaite pas renseigner ces éléments.

Le RGPD est complexe et contient de nombreux cas particuliers. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter le site de la CNIL qui est l’autorité de contrôle pour toutes les personnes établies en France.

Le greenwashing

Vos produits sont neutres en carbone ? 

Félicitations.

Malheureusement, il ne suffit plus de le mentionner dans vos publicités, il faut aussi le prouver (article 12 loi climat et résilience) dans le cadre de la lutte contre l’écoblanchiment. Et donc, le faire. 

En effet, il est désormais interdit de vanter la neutralité carbone d’un bien ou service en l’absence de faits réels, mesurés et prouvés (notamment grâce à un bilan annuel d’émissions de gaz à effet de serre pour le produit ou service concerné). 

Il est également obligatoire d’informer les consommateurs de l’ensemble des démarches écologiques entreprises grâce à un rapport directement accessible depuis le support qui mentionne la neutralité carbone (grâce à un lien hypertexte ou un QR code, par exemple).

Les avis

Vous supprimez les avis de clients qui donnent une mauvaise image de vos produits ? Lorsque vous avez créé votre entreprise, vous avez demandé à vos connaissances de laisser un commentaire positif sur votre fiche d’établissement, alors qu’aucune personne de votre entourage n’a fait appel à vos services ?

Ces pratiques peuvent se comprendre. Les avis laissés par les internautes influencent fortement la décision d’achat des consommateurs. Mais elles sont illégales, car elles les empêchent de prendre une décision en connaissance de cause.

Les avis sont réglementés par le code de la consommation qui a fait l’objet d’une modification en 2022 suite à la directive Omnibus (directive 2019/2161 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019). Les consommateurs doivent recevoir des informations claires sur la manière dont les avis sont traités : 

  • Une procédure de contrôle est-elle en place et si oui, laquelle ?
  • Comment le commerçant s’assure-t-il que mes avis émanent d’une personne qui a acheté le bien ou service ?
  • Les avis publiés font-ils l’objet d’une sélection ? Comment ?
  • Certains avis sont-ils sponsorisés (réduction, obtention du produit gratuitement, etc.) ?

Bien entendu, les commerçants ne peuvent pas modifier ou (faire) rédiger des avis. 

Le non-respect de ces directives peut être considéré comme une pratique commerciale déloyale ou trompeuse.

Pour renforcer la confiance du public, vous pouvez aussi volontairement adhérer à la norme NF-ISO 20488 (« avis en ligne de consommateurs – principes et exigences portant sur les processus de collecte, modération et publication des avis ») qui définit les bonnes pratiques pour la collecte et la gestion des avis de clients.

L’influence commerciale

Depuis le 1er juin, la France s’est dotée d’une législation dédiée à l’influence. La loi précise la notion d’influenceur, gère la situation des influenceurs installés à l’étranger et celles des mineurs. De plus, elle établit ou rappelle certaines règles relatives aux publications commerciales.

L’influenceur est la personne qui utilise sa notoriété pour promouvoir des biens, des services ou des causes grâce à des contenus diffusés par voie électronique à sa communauté, et cela à titre onéreux. Il peut s’agir d’une rétribution financière ou en nature.

Parler gratuitement du petit restaurant italien qui se trouve en face de votre bureau sur Instagram, ce n’est pas de l’influence au sens de la loi. En revanche, si vous recevez un repas gratuit en contrepartie, il s’agit d’une forme d’influence commerciale.

Parmi les bonnes pratiques à adopter par les influenceurs (sous peine de sanction), vous retrouvez la plupart des règles vues dans cet article : 

  • La publicité ne doit pas être trompeuse ou mensongère
  • Toutes les allégations faites au sujet d’un produit ou service doivent pouvoir être prouvées : elles doivent non seulement être vraies, mais aussi vérifiables.
  • Il faut respecter les règles ou interdictions de publicité spécifiques à certains produits (alcool, tabac, médicaments, produits financiers, etc.).
  • La diffamation et le dénigrement sont également interdits pour les influenceurs.

Il est également précisé que les contenus à visée commerciale doivent être identifiés comme tels, par exemple grâce à une mention « publicité » ou « collaboration commerciale ». En effet, il est interdit de faire de la publicité déguisée qui, par nature, est trompeuse, car elle peut passer pour de l’information.

De plus, l’influenceur et la marque sont solidairement responsables pour les actions en dommages et intérêts qui seraient entreprises par des consommateurs mécontents ou des concurrents, par exemple.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter le guide de bonne conduite des influenceurs qui offre une vision claire et détaillée de leurs nouveaux droits et devoirs.

Pour conclure sur les règles légales applicables à la création de contenu

D’autres règles peuvent s’appliquer à la création de contenu. C’est notamment le cas pour certaines thématiques telles que l’alcool, les crypto-monnaies ou les jeux d’argent.

La tentation de ne pas respecter ces règles est grande, notamment parce que d’autres entrepreneurs ne les respectent pas. Souvent, c’est par ignorance. Parfois, par malice. Dans tous les cas, nul n’est censé ignorer la loi et les conséquences peuvent être dramatiques : 

  • Ils doivent publier sur leurs réseaux sociaux qu’ils ont été sanctionnés pour publicité trompeuse.
  • Ils doivent donner 4 % de leur CA pour non-respect du RGPD.
  • Ils se retrouvent embarqués dans un long et coûteux procès contre l’un de leurs concurrents.
  • Etc.

Les risques existent, et il est important de les connaître pour créer vos contenus en connaissance de cause. De plus, la plupart de ces lois sont destinées à protéger les consommateurs. Si vous accordez de l’importance à vos prospects et clients, ne valent-elles pas la peine d’être respectées ?

Cet article a pour objectif de donner des informations générales sur les règles légales qui s’appliquent à la création de contenu. Il ne peut être tenu pour un conseil juridique spécifique et n’a pas pour vocation de remplacer la consultation d’un avocat ou d’un juriste spécialisé dans le domaine.

Pour aller plus loin :